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AUTOUR DE LA CHAUMETTE

Joseph Fouché (1759-1820) 

Célèbre ministre de la police au service de Bonaparte. Fouché possède une puissance de travail phénoménale. Il sait tout sur tous, tout sur les turpitudes de la famille impériale, sur l'empereur aussi qui ne pouvait rien lui cacher de sa vie sentimentale avec Joséphine ou avec ses maîtresses.

Le futur Duc d’Otrante et futur ministre de la Police (du 20 juillet 1799 au 3 juillet 1810), mis en accusation lors de la « réaction thermidorienne » et congédié par Barras, se réfugie, à partir du 31 décembre 1795 à Saint-Leu, dans sa famille, pour se mettre à l’abri des réactions que lui ont valu son action répressive pendant la Terreur. Il passe le reste de l’hiver 1795-1796 et l'hiver suivant dans la commune où habite sa compagne, Bonne-Jeanne  Coignaud.

Louis Madelin, dans sa biographie monumentale en deux volumes (publiée en 1901 et rééditée chez Monde Editions) écrit :

« Fouché se trouva soudain, au comble de la disgrâce, exilé à Montmorency. Il s’y achemina le 10 nivôse an IV (31 décembre 1795) dans les pensées les plus amères. Le misérable subit là une des rares crises de désespérance que nous offre cette vie d’ambitieux tenace… »

Fouché ajoute dans ses Mémoires :

« Ainsi, sous le gouvernement de la République, dont j’étais un des fondateurs, je fus, sinon proscrit, du moins en disgrâce complète, n’obtenant ni emploi, ni considération, ni crédit, et partageant cette inconcevable défaveur, pendant près de trois ans, avec un grand nombre de mes anciens collègues, d’une capacité et d’un patriotisme éprouvés. » 

Emmanuel de Waresquiel écrit dans la brillante biographie publiée en 2014 (Fouché, les silences de la pieuvre. Ed. Tallandier/Fayard) :

           « C’est à nouveau la proscription. Il faut partir… Fouché s’installe avec toute sa famille dans le petit village de tranquille de Saint-Leu-la-Forêt rebaptisé Claire-Fontaine, blotti dans la vallée de Montmorency à une vingtaine de kilomètres au nord de Paris. »

A Saint-Leu ou à proximité ; ses lettres sont datées tantôt de Saint-Leu, tantôt « de la vallée de Montmorency. »  Le lieu précis de cette retraite reste un mystère.

Pourquoi là ? poursuit de Waresquiel :

           Par commodité sans doute, peut-être aussi parce qu’il y retrouve l’un de ses anciens amis montagnard de la Convention et du Club des Jacobins, le régicide Etienne Nicolas Calon, un militaire promu général de brigade en 1793. Calon est alors directeur du Dépôt de la guerre, place Vendôme à Paris…S’il habite Paris, il séjourne souvent à St Leu dont il deviendra maire en 1803 avant que l’un des frères de Napoléon, Louis Bonaparte, n’ y achète l’ancien château en 1804 et que le dernier des Condés ne s’y pende en 1830.

           On ne sait quasiment rien du séjour de Fouché si ce n’est ce qu’en disent les archives de l’état-civil.

Et c’est ainsi que le 23 juillet 1796 (4 thermidor an IV), fut déclaré en mairie de Saint-Leu le décès  d’Evelina, âgée de dix-huit mois, deuxième fille  du couple que formaient Joseph Fouché et Bonne-Jeanne Coignaud :

           « …Par-devant moi, Servais Bourgeois, agent municipal de la Commune de Saint-Leu, canton de Taverny, Département de Seine-et-Oise, sont comparus en la maison commune Joseph Fouché et Nicolas Cordonnier majeurs et domiciliés audit Saint Leu, lesquels m’ont déclaré que Evelina Fouché, âgée de dix-huit mois, fille dudit Joseph Fouché et de Bonne Coigneau, est morte ce jourd’huy à quatre heures du matin dans sa maison située audit Saint-Leu. D’après cette déclaration, je me suis transporté sur le champ au lieu du domicile. Je me suis assuré du décès de ladite Evelina Fouché et j’en ai dressé le présent acte que ledit Joseph Fouché son père et Nicolas Cordonnier ci-dessus dénommés ont signé avec moi. Fait en la maison commune dudit Saint Leu, lesdits jours, mois et an que cydessus ».

Fouché déclara :

« Je viens de perdre le seul enfant qui me restait pour me consoler des injustices et des méchancetés des hommes. Il est donc dit que je suis destiné à pleurer éternellement ! » (Cité par Jean de Brébisson dans « Fouché, Républicain, Impérialiste, Royaliste » Ed. Beauchesne 1906).

Six mois plus tard, le 22 ventôse an V (12 mars 1797), il fit enregistrer, toujours à Saint-Leu, la naissance de son premier fils Joseph-Etienne-Jean-Liberté (1796-1862).L’acte est publié par Henry Caignard dans son Histoire de St Leu (Editions Roudil 1970) :

« Aujourd’huy vingdeux ventose de lan cinquième de la Republique française une et indivisible à dix heures du matin Par devant moi Servais Bourgeois Agent Municipal de la Commune de Saint Leu, Canton de Taverny Département de Seine et Oise, est comparu en la Maison Commune Josephfouché domicilié audit St Leu Lequel assisté de Etienne Nicolas Calon Général d Brigade, Directeur du Dépôt Général de la Guerre domicilié à Paris place Vendome Jeanne Tanquerey domicilié à Nantes ghle fédeau a déclaré ainsi Servais Bourgeois que Jeanne Coignaud Son épouse en légitime mariage, est accouché hier à quatre heures du matin dans sa maison située audit Saint Leu d’un garçon auquel il a été donné les prénoms de Joseph Etienne Jean Liberté D’après cette déclaration que ledit Citoyen Calon et laditte Citoyenne Tanquerey  mont certifié conforme ala vérité et a la Représentation qui ma été faite de l’Enfant denommé jai rédigé envertu des pouvoirs qui me Sont délégués, le present acte que le dit Citoyen Fouché, père de l’Enfant et les deux temoins cy dessus denommés ont Signé avec moi

Fait en la Maison Commune dudit Saint Leu les jour, mois et an que cydessus

Signé :  J.Tanquerey – Bourgeois agent mp – Fouché - Calon

Il faut noter qu’assez curieusement les actes ne font pas mention de Claire-Fontaine, nom officiel de la commune depuis le 3 Gerrminal An II (23 mars 1794).

Le 25 Germinal (14 avril) le Conseil avait en effet acquit un bien national, la chapelle Sainte-Geneviève, « servant actuellement de magasin et un jour propre à devenir le lieu des séances municipales ».

Cette chapelle de 1333 devint donc la première maison commune et l’on peut présumer que les déclarations d’état-civil citées plus haut y furent déposées…

Il aura encore quatre  enfants, trois  garçons et une fille, mais le dernier garçon ne survivra pas.

Le dénommé Calon qui servit de témoin de la naissance du fils Fouché à St Leu était ingénieur topographe et dirigeait entre autres le Dépôt des Cartes et des Plans. Il est l’auteur d’un mémoire sur la délimitation entre la France et l’Espagne portant la date de l’an III. Calon deviendra maire de St Leu en 1803.

Fouché devait également fréquenter à St Leu le petit château de la Chaumette où habitait Louis Marie Hutot de Latour  qui était alors le maire du village et administrateur à Paris de l’entreprise des hôpitaux militaires. Enfin Hutot était le cousin de Michelle de Bonneuil, un agent de renseignement de charme qui travailla pour le ministre de la Police sous le Consulat. Ses filles dont l’une, Laure, épouse en 1798 Michel Regnaud de St- Jean-d’Angely habitaient la Chaumette au moment où Fouché était présent dans la région.

Les relations que Fouché avait conservé à St Leu sont certainement à l’origine de l’arrestation de Cadoudal en 1804 ; il se serait lui aussi réfugié  à St Leu sous la protection de Mme de Bonneuil..

Un événement postérieur associa indirectement Hortense à Fouché. En mars 1815, le Duc d’Otrante, menacé d’emprisonnement par Louis XVIII, loge rue Cerutti, dans une propriété voisine de celle appartenant à la Reine Hortense qui l’avait reçu de son époux Louis après la séparation du couple. Pour fuir les policiers envoyés par le nouveau Ministre de la Police, Bourrienne, Fouché dressa une échelle contre le mur et, tandis que les policiers l’attendaient au salon, sauta dans le jardin de la Reine pour gagner un lieu sûr. (Extrait de  « Fouché » par Stefan Zweig - Grasset réed..2003).

La rue Cerutti, ancienne rue d’Artois (elle le reviendra en 1814), est aujourd’hui la rue Laffitte ; l’hôtel, dit Bolliou  de Saint-Julien, avait été construit en 1772 par Moreau et fut démoli en 1899. Il avait été acheté par Louis Bonaparte le 2 juin 1804,  à  M.de Lannoy.

 Il s’y installa avec Hortense après qu’ils eurent quitté leur logis de la rue de la Victoire. Cela explique pourquoi le futur Napoléon III, son fils, y est né. Jusqu’à sa disparition vers 1899 – pour la percée de la rue Pillet-Will – l’hôtel portait toujours le nom de la reine Hortense.

Michel Louis Etienne Régnaud, Comte de Saint-Jean-d'Angély (1760-1819)

Fidèle parmi les fidèles à Napoléon, jusqu’au dernier jour, Michel Etienne Regnaud de Saint-Jean-d’Angély le fut également à la vallée de Montmorency où il eut plusieurs résidences au cours des vingt-huit dernières années de sa vie.

Député du Tiers (libéral) de la Saintonge (bailliage de Saint-Jean-d’Angély) aux Etats-Généraux de 1789 alors qu’il avait vingt-neuf ans, Regnaud, qui accola alors son lieu d’enfance à son patronyme, fit la plus extraordinaire carrière politique qui soit, le Regnaud de Saint-Jean- conduisant à rencontrer les personnalités les plus célèbres ou marquantes de la Révolution et de l’Empire.

 Né à Auxerre où son père était Président du baillage de Saint-Fargeau, Il avait reçu une formation poussée de juriste.

Dans le traitement des dossiers si divers du Conseil d’État napoléonien, il faisait des merveilles et on disait en plaisantant qu’il était capable de vous dire à l’instant combien de milliards de mouches survolaient l’Europe. Ces qualités intellectuelles impressionnantes mises en valeur par une plume éblouissante le firent distinguer dès les campagnes d’Italie par le général Bonaparte, lequel se l’attacha définitivement. Grand commis de l’état napoléonien, éminence grise et conseiller secret – Napoléon le réveillait la nuit pour le consulter – Regnaud fut quinze ans au cœur du pouvoir, mais ses avis et recommandations à l’Empereur n’ont malheureusement pas toujours empêché les fautes historiques, comme l'exécution du duc d’Enghien et la campagne de Russie. Il a toutefois joué un rôle essentiel dans l’élaboration des codes, avec Cambacérès, et c’est à lui seul que l’on doit le code du commerce. On lui doit aussi d’avoir permis de donner aux Juifs de France une représentation politique et un droit à l’indifférence par la création d’un consistoire, par opposition aux lois d'exception anciennes concernant les Juifs, lesquels, selon Regnaud devaient s'intégrer dans la population, un point de vue qui n'était pas partagé par d'autres membres du Conseil d'Etat.

Travailleur acharné, Regnaud de Saint-Jean-d’Angély aimait passionnément les plaisirs de la vie auxquels il s’arrangeait pour consacrer le plus de temps possible. Au début de la Révolution, alors qu’il était député puis avocat-conseil de l’Ordre de Malte (il intervint lors de la liquidation de celui-ci sous la Législative), Regnaud fréquentait assidûment les salons et cercles politiques , et aussi les jolies femmes attirées par son physique avantageux. Tourné vers la modernité, une partie de lui-même était aussi attachée à la douceur de vivre telle qu’on l’entendait au 18e siècle. C'était un libertin assumé, détaché de la religion catholique, franc-maçon, capable enfin de s’attendrir pour les artistes qu’il protégea, pour les intellectuels qu’il réunissait chez lui et enfin pour la Nature telle que Jean-Jacques Rousseau lui avait donné à voir.

Regnaud de Saint-Jean-d’Angély, qui était bien entendu un admirateur passionné du philosophe, avait effectué un pèlerinage dans la vallée qui devint une retraite de sûreté, probablement à la fin de l’été 1792, lorsque son nom fut cité dans des listes de proscription circulant à la veille des massacres de septembre. On lui reprochait d’avoir pris le parti de la cour après Varennes, et, au 20 juin puis au 10 août 1792, d’avoir dirigé les Grenadiers de la section de Saint-Thomas du Louvre qui s’interposa entre la famille royale et les émeutiers. Revenu à Paris quand le calme fut rétabli, il se dépensa sans compter, avec son ami le poète André Chénier (ils collaboraient tous les deux au Journal de Paris), en faveur du roi déchu Louis XVI devenu Capet, traduit en jugement devant la Convention. Regnaud n’avait plus de mandat électif mais, du moins, un certain nombre d’amis conventionnels libéraux dont l’objectif à tous était d’entraîner le plus grand nombre à éviter ou différer l’exécution du roi reconnu coupable.

Fidèle à ses idées de monarchie constitutionnelle, Regnaud, accusé de royalisme comme de nombreux Constituants, devint la cible du nouveau gouvernement républicain, incarné par le Comité de salut public d’avril 1793 qui mit sa tête à prix.

S’étant enrôlé dans l’armée où il espérait se faire oublier, il fut arrêté aprèsla trahison de Dumoiezur, fut détenu à Paris où il obtint une assignation à domicile, et s’échappa. Grâce à une jeune aspirante comédienne, Mademoiselle Chénié (rien à voir avec André), il se cacha, en partie à Paris, en partie dans la forêt profonde de Montmorency. Sous son prête-nom – Desrichards - il loua l’Ermitage de JeanJacques qui était devenu bien national depuis l’émigration de son propriétaire Monsieur de Belsunce. On raconte que, jusqu’à une visite impromptue de Robespierre en personne les 6 et 7 thermidor, Regnaud vivait dans la discrétion, à l’abri d’une arrestation, bénéficiant certainement de complicités locales. Robespierre voulait-il acquérir l’Ermitage ? Nul ne le sait et lui-même a emporté son secret dans la tombe puisqu’il fut guillotiné trois jours plus tard.

Quoi qu’il en soit, l’ancien député, vite reconverti en homme d’affaires, dut se sentir soulagé. Il créa une société de commerce (Derecq et Cie) puis entra dans l’administration chargée des secours aux blessés de guerre. Le démon de la politique l’ayant repris, il tenta avec ses amis libéraux de noyauter les sections de Paris pour renverser la convention thermidorienne en vendémiaire an IV. Ce fut un échec noyé dans le sang des mitraillades de SaintRoch où Bonarparte s’illustra. Il fallut fuir à nouveau mais pas longtemps car le nouveau Directoire fit voter une loi d’amnistie. Ce dernier épisode nous ramène à la Vallée de Montmorency car, quelques jours avant l’échec du coup de force royaliste, Regnaud était au théâtre avec une très jolie personne et, le voyant, MarieJoseph Chénier le pressa de fuir car la police politique, à sa recherche, était sur le point d’investir les lieux. Et se tournant vers son voisin, Chénier lui demanda : - Mais qui est cette jolie personne qui l’accompagnait ? - Sa toute nouvelle femme, mon ami, fille d’une dame que votre frère André a éperdument aimée.

Depuis sa sortie miraculeuse des geôles de la Terreur et l’exécution de sa sœur Mme d’Eprémesnil et de André Chénier, Mme de Bonneuil, la dame en question, était allée rejoindre sa fille Laure à Saint-Leu-Taverny où presque toute la famille se cachait depuis le début des massacres de septembre. Laure de Bonneuil - âgée de dix-neuf ans - et sa mère étaient à juste titre considérées comme les plus jolies femmes de leur temps, et elles furent l’une et l’autre des modèles de la fameuse Madame Vigée Le Brun et d’autres grands artistes comme Houdon, Regnault, Roslin etc. Autant la mère était royaliste autant la fille était libérale et capable de tomber amoureuse d’un homme comme Regnaud qui avait défendu à la fois les grandes réformes de 1789 et la constitution civile du clergé tout en se faisant le chevalier magnanime des souverains constitutionnels menacés en 1792.

Le coup de foudre fut réciproque et le mariage avait été célébré dans la vallée de Montmorency le 30 thermidor an III. Les cérémonies se déroulèrent dans les salons du petit château dit la Chaumette, propriété de la tante paternelle de Laure, Madeleine Guesnon de Bonneuil et de son mari Louis-Marie Hutot de La Tour. Ce couple avait un fils, cousin de Laure, qui avait épousé une demoiselle Buffaut, laquelle avait été pour elle une seconde mère. Car Madame de Bonneuil, toujours absente, passée de la mondanité parisienne aux prisons de Sainte-Pélagie et des Anglaises, s’était reconvertie dans l’espionnage, de concert avec son amant le député Cazalès, un des principaux correspondants à Londres du Prétendant Louis XVIII en exil. C’est donc Mme La Tour, cousine par alliance de Laure, qui fut sa mère et sa confidente jusqu’à son mariage avec Regnaud. Mais une correspondance inédite de Regnaud de Saint-Jeand’Angély laisse penser que celui-ci était non seulement follement amoureux de sa jeune et jolie femme, mais aussi de Mme La Tour à qui il paraît vouer une passion tendre et retenue dans de longues lettres où il l’appelle chastement « maman ».

 Depuis cette époque les Regnaud de Saint-Jean-d’Angély ne laisseront pas passer une semaine sans venir dans la vallée de Montmorency, d’abord dans le petit château de la Chaumette, puis dans la maison d’Eaubonne qu’ils achèteront à la fin du Directoire.

 Regnaud et sa femme accompagnèrent Napoléon en Italie, à Milan, où ils nouèrent des liens d’amitié durables avec la future impératrice Joséphine.  Puis Regnaud, on le sait, sollicité pour l’expédition d’Égypte, fut prié par le Directoire de s’arrêter à Malte pour républicaniser l’île. Il revint quelques mois avant le 18 brumaire et la prise de pouvoir par Napoléon.

Cependant, Madame Regnaud, déjà célèbre grâce au portrait magnifique par Gérard exposé au salon du Louvre, avait ouvert un salon à Paris, rue Charlot, puis rue de la Chaussée d’Antin, priant aussi ses invités de la rejoindre dans les salons de la Chaumette, où l’on vit parmi d’autres Talleyrand et Mme Grant jouer au whist avec Mme de Bonneuil, elle-même entre deux voyages à Hambourg ou Londres. On y vit de nombreuses personnalités, des étrangers, des artistes comme Isabey et Gérard, de nombreux écrivains et même Madame de Staël, poursuivie par Fouché, qui s’y cacha par une froide nuit de décembre 1802. Les sœurs de Laure commençaient à avoir des enfants, auxquels s’ajoutaient les enfants orphelins de M et Mme d’Eprémesnil, les enfants des amis et voisins, et Regnaud, désirant être au calme pour travailler, fit le choix d’acheter la maison d’Eaubonne, l’ancien pavillon Saint-Lambert, qui disposait d’une superbe cour ornée d’orangers, d’un parc et d’un magnifique verger de cerisiers. Ce fut, dans la région, le troisième domicile de Regnaud de Saint-Jean-d’Angély qui aimait à s’y retirer dès que le premier consul lui laissait un peu de répit. Naturellement, les visites et les échanges d’enfants étaient nombreux entre la Chaumette et Eaubonne, où Laure cherchait à occuper le fils que son mari avait eu sous la Terreur de cette jeune comédienne qui s’était dépensée au risque de sa vie pour le cacher et qu’elle espérait épouser en des temps meilleurs. Mais la jeune femme était morte peu après le 9 thermidor en donnant la vie à un petit garçon (futur maréchal Regnaud de Saint-Jean-d’Angély). Laure avait adopté l'enfant sans hésitation car, nous le savons, celui-ci l’appelait « maman ».

 La vie à Eaubonne était essentiellement champêtre et tournée vers des plaisirs simples comme le thé dans des tasses Wedgwood, des promenades, des jeux de barres et, bien sûr, le jeu. On connaît tous ces détails grâce à la correspondance du comte et de la comtesse Regnaud, anoblis en 1808, qui se sont échangés des centaines et des centaines de lettres inédites, pieusement conservées par leur fils qui les a transmises à ses héritiers.

C’est là qu'ils vécurent la fin de l’Empire et les drames qui en découlèrent. Éphémère ministre des Cent-Jours, Regnaud fut, on le sait, décrété de prise de corps et s’exila aux États-Unis avec Joseph Bonaparte, ses biens furent partiellement saisis, le Val fut mis en vente 200 000 francs et, en avril 1817, Laure, fidèle bonapartiste, fut arrêtée dans sa propriété par la police secrète de Louis XVIII qui l’envoya à la Conciergerie. Une lettre compromettante saisie, adressée à son mari à New-York, fut le motif d’une inculpation de crime de lèse-majesté, mais, grâce aux relations haut placées de Madame de Bonneuil, la comtesse bénéficia d’une grâce exceptionnelle, ne fut pas mise en jugement et on se contenta de l'expulser de France. Déjà malade, Regnaud voulut traverser l’Atlantique pour secourir sa courageuse épouse et arriva, épuisé, dans ses bras aux Pays-Bas, puis tous deux allèrent en Belgique d’où ils furent expulsés suite à des accusations infondées de la police secrète selon lesquelles la comtesse Regnaud aurait financé un complot contre lord Wellington. Le couple mena une vie de proscrit en Allemagne, en Prusse, en Bohême, en Styrie où, par haine, certains s’acharnaient à les faire chasser.

La santé de Regnaud déclinait, et, à Paris, tous ceux qui l’estimaient cherchaient à obtenir du roi que cet exil injuste cessât : Regnaud n’était pas un régicide et contrairement à d’autres, il n’avait pas de sang sur les mains. Louis XVIII céda, et le couple put enfin revenir vivre en France. Accablé par la maladie qui le minait et les fatigues du voyage, Regnaud mourut le 11 mars 1819 en arrivant à Paris, et c’est non sans émotion qu’on évoque ces lignes tracées de sa main, trouvées dans ses papiers : « Le livre de la vie est le livre suprême qu’on peut refermer ou rouvrir à son choix. Le passage attachant ne s’y lit pas deux fois, mais le feuillet fatal se tourne de lui-même. On voudrait revenir à la page où l’on aime, mais la page où l’on meurt est déjà sous les doigts ».

Devant l’hôtel de ville de Saint-Jean-d’Angély se dresse la statue de Michel [Louis Étienne] Régnaud, comte de Saint-Jean-d’Angély

La statue porte la signature et la date suivant « F. Bogino F[e]c[i]t 1862 ». Frédéric [Louis Désiré] Bogino (Paris, 1831 – Paris, 1899), très connu pour son monument à la gloire de la France à Mars-la-Tour, près de Metz, site d’une célèbre bataille de cavalerie de la guerre de 1870 (elle a fait 1500 morts entre le 16 et le 18 août 1870). La statue de Saint-Jean-d’Angély a été inaugurée le 23 août 1863.

OLIVIER BLANC est l’auteur d’une dizaine d'ouvrages sur la fin du XVIIIe siècle, la Révolution et l'Empire. « La dernière lettre », recueil des ultimes messages des condamnés à mort de la Terreur, a été un succès de librairie. Cet ouvrage souvent traduit, démontre une érudition sans faille au service d'un travail de plusieurs années dans les archives publiques et privées. La même exigence méthodologique et documentaire caractérise ses essais remarqués sur l'espionnage international pendant les guerres de la Révolution et les milieux libertins sous Louis XVI. Plus récemment, il a publié en 2004 une biographie du conseiller d'État et ministre de Napoléon I Regnaud de Saint-Jean d'Angely dont la famille vécut à la Chaumette de St Leu. Cette propriété fut, depuis la fin du règne de Louis XVI jusque sous l'Empire, le théâtre d’'évènements politiques et mondains, autour des Guesnon de Bonneuil, Olivier Blanc a évoqué lors d’une brillante conférence tenue le 15 décembre 2012 les personnalités de Michelle Guesnon de Bonneuil, femme galante et agent secret, dont il a publié la biographie en 1987 ainsi que celle de ses filles, notamment Laure qui fut l’épouse de Regnaud.Olivier Blanc est revenu sur Mme de Bonneuil et le mystère de ses périples dans l'Europe en guerre de la Révolution à l'Empire dans « Les Espions de la Révolution et de l'Empire » en 1995." Il a bien voulu nous permettre de publier ce texte inédit.

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Georges Cadoudal  (1771-1804) 

Georges Cadoudal est né à Brech le 1er  janvier 1771 et mort guillotiné le 25 juin 1804 à Paris. Il était un Général Chouan qui projetait de renverser le 1er Consul Bonaparte. Il a séjourné à Saint-Leu pendant sa conspiration.

Il fut nommé Maréchal de France à titre posthume, commandant de l’Armée catholique et royale de Bretagne. 

 

 

 

 

 

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